Bon, à la demande Nilb, Riff et Jojo, un petit tutoriel vite torché :
Comment écrire un scénario ?Bon , finalement , ça me semble perdu d’avance d’essayer de faire un tutoriel sur ce sujet… parce qu’à mon avis, il y a autant de manière de faire que de scénaristes… et puis ça a tendance à se confondre avec la question « comment trouver des idées » dont je vous parlerai une autre fois.
Mais bon ,là, je vous propose quand même en vrac ma manière de faire ou de poser le problème. Peut-être que chacun pourra y piquer un ou deux bonnes idées pour trouver une méthode à sa sauce.
D’abord des généralités, et puis après on détaillera un peu :
Que faut-il au départ ?D’abord, peu importe qu’on ait envie de faire une saga en 25 volumes de 50 pages ou un gag en 1 seule planche, le départ est le même : il faut pouvoir connaître cinq choses avant même de commencer :
1. Quel est le thème ? (en gros, de quoi ça parle ?)
2. Quel est l’angle ? (en gros, c’est le style d’effet qu’on veut produire: comique lourdingue, comique délirant, comique raffiné etc …,ou un ton fantastique, sinistre, émouvant, sentimental etc…)
3. Quelle est l’idée principale ? ( de gag, de chute, ou de scène extraordinaire, de signification de l’histoire…)
4. Quelle est la « matière » ? ( tout ce qui va « autour du récit », et qui donne l’ambiance)
5. Est-ce que le style (ou le niveau ) de dessin est adapté à ce que je veux faire ? ( la guerre des étoiles avec des bonshommes patates ça peut être drôle, mais ça aura du mal à être terrifiant)
Quand on a réfléchi à ces cinq choses, on a des chances que ça marche.
Après, comment on fait ?: D’abord il est
essentiel de connaître la taille de ce qu’on va faire . On ne fait pas le même genre de scénar pour 1 page ou pour 10, ou pour 100.
Donc :
Décider de la taille de l’histoire dès le début. ( Au moins à la louche)
Une fois qu’on a déterminé cette taille, il faut avoir une idée du nombre de « séquences » ou de morceaux qu’elle va contenir .
Si c’est un strip, ça va être 3 ou 4 cases,
si c’est une page, ça va être une douzaine de cases,
si c’est un album, une cinquantaine de pages.
Mais, youpi, le principe est le même :
Pour écrire un strip , c’est simple , genre :
1) Nil (lisant) à Nelsia :
Vous savez ça ? Il n’y avait qu’un chien à l’enterrement de Mozart !2) Nelsia ( qui s’en fout) :
Ah ?3) Nil (agacé) :
Vous ne trouvez pas ça terrible ?4) Nelsia ( qui s’en fout) :
Non , je ne sais pas combien il en faut d’habitude.( bon c’est nul, c’est un exemple) .
Bref, j’ai découpé ce dialogue en 4 séquences parce que je savais que j’allais faire 4 cases.
Si j’avais voulu faire une page, j’aurais essayé de trouver une idée qui va se développer en une douzaine de cases, en allant vers une direction finale.
Pour écrire une histoire plus longue c’est le même principe exactement.
Pour une grande aventure de Nil, je sais que je vais devoir remplir 54 pages.
J’écris donc sur une feuille (Word) les chiffres de 1 à 54, et en face, je mets le titre de la page ou de la scène, ou ce qui doit s’y passer en 1 phrase :
Exemple :
Pages
1 : Ils arrivent sur la planète Krypton
2 : Ils s’étonnent d’y voir des arbres très étranges
3 : Ils décident de couper quelques branches pour faire du feu
4 :les arbres les attaquent
5 :ils s’enfuient
6 : etc…
et tout ça jusqu’à 54.
Ensuite je vais reprendre chacun de ces titres et je vais essayer de développer comment ce qui est décrit dans chaque ligne va arriver, et se développer. C’est généralement en faisant ça que d’autre idées viennent et que je change tout, que j’inverse des scènes, que j’en ajoute, que j’en supprime etc…
Parfois, je ne sais pas ce qu’il y a entre les pages 38 à 43 par exemple, alors je laisse en blanc jusqu’à ce que ça vienne, de manière souvent très logique.
MAIS JE NE COMMENCE RIEN AVANT D’AVOIR UNE IDEE SUR TOUT.
Même si je n’ai toujours pas écrit une ligne définitive.
Quand ça tient à peu près debout, je cherche, page par page, ou scène par scène, comment être plus original, en rajoutant des gags, en cherchant un autre angle pour une scène un peu trop calme ou banale . C’est souvent bien d’alterner les moments forts et les moments d’explication. Je cherche aussi s’il n’y a pas moyen de rajouter un suspense en bas de page ou un gag (j’ai un peu abusé de ça la dernière fois, mais il faut donner envie de passer à la page suivante !)
Et là c’est le moment où j’en bave, où j’en ch…, où j’en rêve la nuit, où j’empoisonne mon entourage parce que je ne pense qu’ à ça !
Après seulement, quand tout est à peu près prévu, ( et ça tient en deux pages !) je commence à écrire les dialogues (mais je pourrais presque commencer à dessiner, en improvisant parce que je sais à peu près où je vais) La seule règle à suivre, c’est que les scènes ne dépassent pas la taille que je leur ai donnée au départ, sinon je suis sûr qu’il y’a un moment où plus rien ne tiendra debout. Des fois , ça oblige à sacrifier des trucs qu’on trouvait pas mal, mais pas forcément indispensables à l’histoire.
En fait , j’ai sauté une étape essentielle pour moi : avant même de commencer quoi que ce soit, je passe une semaine à lire tout ce qui me tombe sous la main concernant le sujet dont je veux parler. Je ne note rien, je ne retiens rien… mais tout revient au moment où je fais mon scénar, et trouve sa place. (Mais là c’est chacun son truc)
Après, est-ce qu’on est obligé de tout écrire avant de commencer à dessiner ? Je crois que ça tue un peu l’envie de dessiner… Mais il me semble indispensable d’avoir fait ce découpage en séquences avant… C’est une sorte de « feuille de route » .Ca fait qu’on se réjouit à l’avance de la scène qui arrive dans 3 pages, et qu’on avance sans s’en rendre compte.
Une fois ce découpage en pages, qui sont devenus des petits paragraphes, avec des bouts de dialogues, j’essaie de voir dans chaque page en combien de cases ça peut être divisé , ça me donne une idée du nombre de cases à faire et de leur taille.
Et généralement je fais juste un story-board avec des cases grandes comme des timbres-poste cinq minutes avant d’attaquer mes dessins définitifs.
Bon cette méthode n’est pas la seule…mais j’ai été surpris récemment de lire que c’était celle de Goscinny pour Astérix, Lucky Luke et Iznogoud : Découper toute l'histoire en tranches et remplir chaque tranche peu à peu et au fur et à mesure. Et Goscinny disait (paraît-il ) » je ne lâche une page que lorsque je ne peux plus rien y mettre de plus comme gag ». ( On a vu la différence avec les albums d’Uderzoo seul, tous tragiquement creux, même si l’idée de départ pouvait parfois sembler valable.)
C’est dix fois mieux comme principe que de faire (comme dans beaucoup d’albums) dix pages géniales au départ, puis de s’essouffler dans la durée sans savoir quoi dire de plus.
Et quand le scénar est fait, on est content… et on dessine en s’éclatant sur le dessin, et seulement sur le dessin…pour rajouter tout ce qui manque au texte… même si le résultat est (souvent) moins bien que ce qu’on avait imaginé. (C’est la vie.)
Voilà, c’est tout pour aujourd’hui. Sortez sans faire de bruit avec vos chaises.
![Very Happy](https://2img.net/i/fa/i/smiles/icon_biggrin.png)